Dating : Pourquoi tous les hommes aiment les mêmes films ?

En vaguant et divaguant sur les applications de rencontre, je me suis vite rendu compte que la gent masculine avait un certain penchant pour les films d’action. Pourquoi cet engouement si banal ?

On le sait depuis la nuit des temps, les garçons aiment l’action et les filles aiment la romance. Cette affirmation archétypale fut tellement rabâchée que l’on pourrait presque y croire. À l’ère du dating, j’ai passé des heures à swiper des milliers de prétendants dans l’espoir de combler l’ennui inéluctable de ma vie. Au lieu de trouver l’homme idéal, j’ai surtout remarqué à quel point les hommes avaient des goûts similaires. En parlant avec une multitude de garçons, j’ai découvert que la Sainte Trinité du cinéma était formée de Fight Club, La Haine et Pulp Fiction. Les rencontres virtuelles s’enchaînaient et je ne tombais que sur des amateurs de gros bras et de réalisateurs. 

Comment expliquait une telle passion pour ces films ? Décryptage.

Des discussions et toujours un point commun : Le génie de Tarantino 

En installant Hinge, un peu sceptique, je me lançais dans une nouvelle aventure au pays du dating. Après avoir eu Tinder pendant un an, il me fallait changer d’air. Quelle fut ma surprise en tombant nez à nez avec les mêmes gens auxquels je n’avais jamais répondu. Cependant, le plus grand étonnement fut sans aucun doute l’uniformité alarmante des goûts artistiques de mes matchs. En tant qu’adoratrice du septième art, je comptais échanger avec des perles rares (aimer Aftersun, ce n’est pas trop demandé.) Bizarrement, le constat était clair : les hommes aiment tous les mêmes films. 

La Haine, Fight Club et Pulp Fiction. (Et American Psycho !)

À chaque match, le fameux Thomas était fidèle au poste pour m’annoncer que La Haine était une révélation pour lui. Ce jeune homme, étudiant en école de commerce, vivant en plein Paris, me vantait les messages du film de Kassovitz. Il adorait m’expliquer la manière dont il se voyait dans le personnage de Vincent Cassel. Que la violence de ce monde l’avait heurté au plus profond de son être. Tandis que j’avais déjà vu ce film mythique, il m’étalait sa science avec bienveillance sans se rendre compte que je connaissais déjà l’histoire. Est-ce du mansplaining ? À vous de me le dire. En tout cas, j’avais comme une impression de déjà vu en entamant une nouvelle discussion.

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Une masculinité en crise ? 

En somme, ces choix de films ne sont pas anodins. Ils entrent dans la catégorie des films d’action et mettent en scène des hommes qui se battent et qui s’insultent, dans un milieu plutôt hostile. Pour information, Fight Club est l’œuvre des incels, les hommes qui vouent une haine inconditionnée aux femmes. Attention, je ne pense pas que tous les hommes sont des incels. Mieux vaut le dire en guise d’avertissement. 

Dans le podcast Cinérameuf, Alice Creusot explore les dessous du film de David Fincher, au côté de l’universitaire Pete Deakin. Leur discussion met en lumière le contexte de sortie du film : les années 90. Lors de ces recherches, il s’est rendu compte que les films violents étaient directement lié à la notion de genre. Ainsi, ces films hollywoodiens comme Fight Club et American Psycho ont vu le jour dans un contexte où la masculinité était en crise. Alors que les rapports genrés se voyaient chamboulés, les hommes ont vu leur position sociale modifiée, au profit de plus d’égalité. En réaction, les réalisateurs ont fait des films aux personnages masculins « torturés » en quête de sens. La fin du millénaire signe alors une période bénie pour les productions américaines masculines. Par le biais de la bagarre et du sang, les héros ou anti-héros retrouvent leur domination millénaire. En somme, on peut aussi parler du cas American Psycho, sorti en 2000, et de la fascination masculine étrange pour Patrick Bateman. Deux ans auparavant, le personnage était devenu une idole sur TikTok. Modèle de réussite avec son costume et sa gueule d’ange, il attirait une communauté de jeunes garçons en plein développement. Une obsession flippante sur un homme qui tue des gens, n’est-ce pas rassurant ? On aurait pu trouver une figure d’identification plus gentille.

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Si l’on analyse dans un dernier cas le film La Haine, on se rend compte qu’il n’est que masculinité et violence. Les hommes ne s’expriment qu’à travers des insultes et des comportements outranciers. Les seuls personnages féminins sont soit des membres de la famille soit des femmes que l’on agresse verbalement. Dans ce film de Kassovitz, la violence peut être comprise car elle est le seul moyen d’expression d’une jeunesse oubliée. Cependant, le regard masculin est omniprésent avec des références à Taxi Driver et sa scène mythique que Vinz reproduit en citant le fameux « You talking’ to me ? » Malgré un message symbolique, La Haine cristallise la violence masculine et exclut toutes représentations féminines hors du foyer. 

Ras-le-bol des applications de rencontre ? 

Par conséquent, les hommes sont-ils donc fascinés par la violence au cinéma ? Cette question est peut-être trop généraliste si l’on part d’une expérience personnelle. J’avoue adorer les films de Scorsese et de Coppola sans pour autant être fascinés par la violence masculine. Néanmoins, je réfléchirais un peu plus quand mes matchs me parleront de leurs films préférés. Ces hommes censés me correspondre commençaient vraiment à devenir des red flags ambulants. Peut-on donc déduire que nos matchs Hinge ont mal à leur masculinité ? En attendant de trouver une réponse, j’ai eu vite fait de m’habituer à ces réponses similaires. 

En parlant avec ma rédactrice en cheffe, nous avons ostensiblement remarqué que les applications de rencontre étaient devenues une sorte de nouvel Instagram. Les matchs sont éphémères et bien souvent, les conversations ne durent qu’une nuit. Au pire, on gagne un abonné de plus sans jamais rencontrer ces Thomas ou ces Paul qui adorent Pulp Fiction. On installe puis on désinstalle comme si ça allait changer quelque chose. 

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Faut-il refaire confiance aux bonnes vieilles rencontres au coin du feu ou au bord d’une piscine ? L’avenir le dira. En attendant, citons notre merveilleuse Chapell Roan, dans sa chanson Femininomenon : 

You sent him pictures and playlists and phone sex

He disappeared from the second that you said

"Let's get coffee, let's meet up"

I'm so sick of online love

And I don't understand, why can't any man

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