Albert Newton : Entre Terre et Cosmos, l'Odyssée Musicale de “Twin Earth”

© Fabienne Pelon - Escale Cafe

Dans un paysage musical dense, Albert Newton se distingue avec « Twin Earth », un premier album lancé le 9 février 2024. Mêlant origines franco-britanniques et talent singulier, il explore les sentiments humains et leur écho dans un « urbanisme céleste », fusionnant expérience terrestre et questionnements cosmiques.

Dans cet opus, rien n’est jamais présenté comme parfait dans notre monde, pourtant, c’est avec une tendresse et une gratitude manifestes qu’Albert Newton en dresse le portrait, insufflant à travers ses mélodies un optimisme contagieux, presque nécessaire dans le contexte actuel.

Désireux de plonger au cœur de son univers, nous l’avons invité le 12 février à se prêter au jeu de l’interview, dans un format questions-réponses qui permet de naviguer au plus près de son processus créatif. Qui est-il vraiment ? D’où lui viennent ses inspirations si particulières ? Comment parvient-il à entrelacer les thèmes de l’amour, de la perte, et de l’espoir avec une telle finesse ? Autant de questions auxquelles cet échange cherche à répondre, pour mieux comprendre l’homme derrière la musique, et ce qui fait de « Twin Earth » un voyage si singulièrement touchant.

PRSNA : On aimerait en apprendre plus sur toi :  d’où viens-tu ? Quelles sont les références à ton nom d’artiste “Albert Newton” ?

Albert Newton : « Albert Newton », c'est venu il y a pile un an, avant, je m'appelais Gustavesss, j’avais un autre nom de scène et en fait pendant le confinement, j’ai eu beaucoup de temps afin de réfléchir au projet et à ce que je voulais raconter. C’est à ce moment-là que j'ai justement eu cette révélation, cette découverte d’une nouvelle intention, j’avais un nouveau message à porter que je trouvais beaucoup plus cohérent avec un nouveau nom. Gustave ça ne collait plus, je commençais un nouveau chapitre : c’est vraiment comme ça que je vois la vie, l’art et mon œuvre. Comme quelque chose qui grandit et qui évolue, pas nécessairement quelque chose qui est figé à tout jamais. Le nom, il s’explique, je pense que vous avez la réf : j’ai un peu fait un collage de noms de deux personnes qui m’ont assez inspiré dans l’écriture de cet album (Albert Einstein et Isaac Newton). L’idée est venue lorsque j’ai cherché un nom, j’ai un peu regardé comment on fait d’autres artistes, Frank Ocean par exemple avait collé deux noms qu’il aimait bien, Travis Scott également. J'aimais bien ce truc de créer un nouveau personnage en collant deux noms.

PRSNA : Peux-tu nous parler de ton parcours avant cette sortie d’album ? 

AN : Avant cet album, j’ai sorti un EP, pour moi, c'était le point de départ de ce nouveau chemin professionnel dans l’industrie de la musique. Avant ça j’étais en histoire de l’art, j’ai pu travailler au centre Pompidou, dans des ventes aux enchères, tout en écrivant plein de textes, c’est comme ça que j’en suis venu à la musique : je voulais chercher un moyen de trouver comment mettre en avant ces textes, la musique semblait être un bon moyen.


P : Quels artistes ou œuvres ont pu t’inspirer dans la réalisation de cet album ?

AN: Il y a vraiment plusieurs artistes, c'est un peu ma volonté, je ne voulais pas faire un album hyper homogène où tous les morceaux se ressemblent, je voulais vraiment représenter ce que j’écoute moi. Il y a du Franck Ocean, Philip Glass qui fut un peu l’origine de mon inspiration lorsque j’ai écrit le titre “Earthrise 2B”, également Hans Zimmer, ils t’emmènent dans l’espace, ils te font beaucoup prendre du recul sur là où on est, sur ce qu’on est. Plus globalement, “Litlle Dark Age” de MGMT, un méga album un peu conceptuel, il y a une sorte de narration, mais on n'en est pas trop sûr, et j’aime beaucoup ce flou là.

La partie métal avec mon titre “Hello Black Hole” qui est inspiré de King Gizzard & the Lizard Wizard, un groupe australien très inspirant pour moi qui a fait une quinzaine d’albums, on y retrouve parfois de la flûte méga pop, et d’autres full métal et full rock, je trouve ça trop bien cette liberté de faire ce qu’on veut.

P : On a cru comprendre que tu étais franco-britannique, quel rôle a joué ton environnement, ta ville natale, tu chantes en anglais, tu parles français, tu peux nous en dire plus ?

AN: Ma mère est anglaise, et je suis né à Oxford, c’est vraiment du 50/50, je passe autant de temps selon moi en France qu’en Angleterre, l’année dernière, j'étais à Londre, cette année, je suis à Paris : je fais vraiment tout le temps ces aller-retour entre la France et l’angleterre. Je ne me considère ni exclusivement l’un ni exclusivement l’autre, mais plutôt les deux. Pour moi ça a toujours été plus qu’évident d’écrire en anglais, mais ce n'est pas impossible qu’un jour, j'écrive en français.

P : Quelles sont tes attentes vis-à-vis de ton public au vu de la récente sortie de ton album ?

AN: Dans un premier temps, je n’ai pas trop d’attentes, dans le sens où je sais que c’est une œuvre qui va prendre du temps à s’expliquer ainsi qu’à se faire comprendre. Ce n’est pas une œuvre qui répond aux référencements Tiktok ou encore qui sert l'algorithme du buzz ect. Il n’y a pas de morceaux électros mis à part “Somewhere in the dark” qui est un peu plus pop. Je suis ok avec ça, et je veux vraiment prendre le temps de raconter comment l’album est composé. Il est écrit avec plusieurs épaisseurs. Pour commencer, je pense que depuis sa sortie, les gens l’écoute en mode chill, ils découvrent encore la mélodie. Mais il y a plusieurs couches à tout ça, il existe plusieurs liens entre les chansons, dans le texte plusieurs sens cachés, il y a tout un truc que j’ai envie d'expliquer. Je vais prendre le temps d’enlever chaque pellicule à l’oignon, mais je n'ai pas envie de tout dévoiler, c’est pour ça que je n’ai pas trop d’attente pour l’instant.

P : En parlant de chansons, il y en a une que tu aimes le plus ? et pourquoi ?

AN : Je pense que celle qui me touche le plus c’est “Kuuki Yomenai”, un morceau en piano voix, même aujourd’hui quand je la chante elle m’émeut toujours : je me mets vraiment à nu. Je pense au pardon de soi-même ainsi qu’au pardon du monde qui nous entoure. Surtout en ce moment par le climat actuel, de voir la violence qui règne dans le monde, ce n'est pas facile à pardonner, à accepter. Ce double parallèle est assez difficile, dans cette chanson, je parle de silence qui est comme une nécessité tout comme le recul que l’Homme devrait avoir sur ce que l’on représente comme espèce sur terre. Je suis hyper fier de ce texte-là, donc je pense que c’est elle ma préférée pour l’instant.

© Ariel Fish - Albert Newton in London

P : Tu nous parles de pardon de soi, de pardon de la violence etc, est-ce que tu dirais que c’est le thème central de ton album ?

AN : Non, je ne dirai pas que c’est le thème principal, mais ça en fait partie. Le thème le plus principal, si je devais résumer tout ça, c'est vraiment prendre du recul. C’est l’histoire de quelqu’un qui essaye de comprendre sa place dans l’univers, qui essaye de comprendre la place de l’être humain sur terre et d’y voir la beauté, et la rareté de ce que l’on représente. Dans l’album, je commence par dire que j’ai envie de sauver le monde, mais que je sais que je ne vais pas y arriver. La dernière chanson qui s’appelle “Gravity Shop” juste avant le refrain, c'est comme-si le personnage de l’album avait accepté cette fatalité, il dit qu’il sait qu’il ne peut pas sauver le monde, mais s'il devait tout refaire, il le referait pour l’Amour. C’est un petit voyage, c’est un album, je ne peux pas tout raconter d’un coup. Je questionne sur le fait de prendre du recul, et de regarder de plus loin ce que l’on est, et moins se concentrer sur les petites histoires de nos jalousies, de nos haines, de nos passés et admirons ce qu’on est. 

P : Comment tu vois ton évolution personnelle et l’évolution de ta musique, qu’est-ce que tu aimerais découvrir ?

AN : Justement, c'est hyper intéressant, parce que ce premier album me donne un peu un repère, c’est le fruit de trois années de travail. L’écriture de la musique ça m’a pris un an, et il y a tout le reste côté business. C’est un gros truc, par exemple au mois de décembre, j'étais un peu stressé de tout ça, on arrivait bientôt à la fin : le moment où il faut assumer tout ce que l’on est. Maintenant que c’est sorti, j’ai ce point de repère et je suis hyper content de l’avoir. Je me sers vachement de la cover, le fait que ça soit minimaliste, que ça soit un os comme ça assez froid, j’ai envie de partir de là et ça me donne un repère pour la suite, comme une sorte de réponse au travail déjà présent : maintenant que ce repère est posé, j'ai envie de me répondre limite. J'étais justement en train de composer avant la visio. Je vois bien l’évolution.

P : D’où t’es venu l’idée de l’os sur ta cover ?

AN : C’est une référence directe au film “2001, l'Odyssée de l’espace” réalisé par Stanley Kubrick (1968). À la fin de la première scène qui s'appelle “L’aube de l’humanité” il y a un singe qui jette un os en l’air qui se transforme en vaisseau spatial. Sur le vinyle de l’album, la face A représente l’os et la Face B c’est le vaisseau. Du coup quand tu tiens l’objet entre tes mains, tu transformes l’os en vaisseau, c’est un peu l’histoire de l’humanité en un geste, tu passes de la préhistoire au futur, c’était un peu ça l'idée.

Albert Newton - Twin Earth

P : Quelle chanson d’un artiste que tu apprécies, aurais-tu aimé écrire à sa place ?

AN : Pas mal cette question, il y en a tellement, mais je vais dire “Night” de Frank Ocean. Tout ce qu’il a écrit enfaite, sa façon de composer, je trouve ça vraiment ouf, cette manière de juxtaposer des images dans ses textes, c’est vraiment next level !

P : Est-ce que tu as rencontré des difficultés, des challenges en réalisant cet album, quels conseils aurais-tu aimé recevoir avant l’élaboration de celui-ci ?

AN : Le côté visuel fut un challenge, la traduction de la musique à l’univers visuel, je pense que j’aurai aimé me dire de prendre de l’avance à l’époque. En vrai, on a commencé tout ça il y a un an, et même un an, ce n'était pas assez. Le temps de trouver les financements, les partenaires, ainsi que les idées ect. En fait, cette année où j’ai dû porter le projet un peu secrètement, ou juste focus sur les visuels, j’ai trouvé ça assez dur, ça t’occupe beaucoup l’esprit et ça t’empêche un peu d’avancer sur la suite. Je me serais dit “prends de l’avance et essaye de lâcher prise, pose tes idées rapidement et avance”.

P : Tu nous disais que tu étais en train de composer juste avant notre appel, as-tu des rituels spécifiques avant d’écrire de la musique, avant de composer ?

AN : Non pas vraiment, par contre, je compose le matin surtout. À partir de 16h - 17h la journée, c'est quasiment fini, j’aime beaucoup me lever tôt.

: Avec quelle artiste aimerais-tu collaborer ?

AN : j’ai la chance d’être proche de Clara Luciani, on est un peu comme frère et sœur donc pour moi, c'est une collab directe qui aurait du sens. Après plus à l'international comme Fontaines D.C.  c’est des gars que je trouve complètement fou. 

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